Communiqué national du SNJ: A L’Est, coup de froid sur le pluralisme

Publié le par lebramentombe

Le journal L’Alsace et Le Républicain Lorrain, tous deux propriété du Crédit Mutuel, entreront courant 2008 dans le giron du groupe Ebra (l’Est Républicain). Pressentie depuis plusieurs mois, l’opération a été confirmée mardi par le vice-président directeur général, Gérard Colin, devant le comité de groupe élargi.

« L’intégration des deux journaux ne modifiera pas la répartition du capital du groupe », a précisé le patron d’Ebra, pour couper court à l’idée sous-jacente d’une prise de contrôle du Crédit Mutuel. Gérard Colin a néanmoins refusé de dévoiler les contours du plan financier, qui permettra à la famille Lignac (Est Républicain) de rester majoritaire (51% contre 49 au Crédit Mutuel), dans un écran de fumée.

S’agissant de L’Alsace, « le dossier est prêt chez notre avocat, et sera déposé en janvier à Bercy », a encore affirmé Gérard Colin, expliquant que le nouveau directeur des Dernières Nouvelles d’Alsace (DNA), Jean-Claude Bonnaud, était chargé « d’étudier le rapprochement entre les deux titres ». Ce qui a été bizarrement démenti jeudi, devant les salariés et dans les instances, tant aux DNA qu’à L’Alsace, dans une curieuse partie de poker menteur.

Le SNJ, premier syndicat de journalistes en France, dénonce ce nouveau coup bas porté au pluralisme dans l’Est. Il condamne ce pas franchi vers plus de concentration, qui ne peut que susciter les pires inquiétudes, tant du point de vue de l’identité des titres, que de l’emploi au sein de ces journaux.

Plus que jamais, Le SNJ appelle les rédactions à se mobiliser pour le maintien d’une concurrence éditoriale en Alsace, dans le Nord Franche-Comté, en Lorraine, et pour exiger du groupe Ebra qu’il garantisse les effectifs rédactionnels dans l’ensemble de ces sociétés.

Enfin, le SNJ entend dénoncer la politique de la fuite en avant, seule motivation de cette nouvelle étape dans la construction d’un ensemble à l’équilibre précaire, qui contraindra un jour ou l’autre le Crédit Mutuel à sortir du bois. En 2006, le rachat du pôle Rhône-Alpes de la Socpresse par le groupe L’Est Républicain avait fait grimper l’endettement de l’ensemble du groupe de 52,2M€ à près de 340 M€. Les projections font état d’un endettement de l’ordre de 380 M€ à fin 2007, pour un chiffre d’affaires de 550 M€.

Surtout, l’opération se traduira, au cours de la seule année 2008, compte tenu des départs « volontaires » subventionnés par l’Etat dans le cadre du plan de modernisation de la presse, par la destruction de plus de 700 emplois. Soit l’équivalent, en effectifs, d’un gros journal de PQR englouti.

le 21 décembre 2007

Communiqué national du SNJ après le comité de groupe où est annoncé l’intégration de L’Alsace dans EBRA

Ci-dessous compte rendu du Comité de Groupe:

Compte rendu du comité de groupe Est Républicain du 18 décembre 2007, à Houdemont

Direction représentée par Gérard Colin, Serge Ferreira (DRH) et Mario Panigali (directeur financier)

SNJ : Marie-Sophie Kormann (DNA, titulaire), Laurence Perbey (La Tribune-Le Progrès, suppléante), Eric Barbier (ER, titulaire), Daniel Bordur (ER, représentant syndical), Bruno Borsuk (LE, titulaire), Vincent Lanier (Le Progrès, titulaire), Jean-Pierre Tissier (JSL, suppléant).

Rapport d’expertise des comptes 2006 par Sécafi-Alpha Le groupe est passé le 1er juin 2006 de 29 à 61 sociétés « consolidées », notamment DL, BP, JSL, Progrès, Publiprint, TLM, Lyon Plus qui composent la holding Delaroche. La prise de contrôle est définitive depuis août 2007 et une décision de Bercy après la saisine de la DGCCRF par GHM (Groupe Hersant Média). La place de Delaroche entre pour les seuls sept derniers mois de l’année. Le rachat est exclusivement financé par le Crédit Mutuel avec compte courant bloqué jusqu’au 8 juin 2009. Aucun échéancier de remboursement n’est prévu. Aucun pacte d’actionnaires n’est officiellement signé. Aucune garantie n’a été présentée à la DGCCRF. Les titres ER ou L’Alsace peuvent être apportés à EBRA, mais aucun accord n’est fixé. Organigramme : L’ER chapeaute le groupe. Il détient 98 % des DNA (98%), 51 % de la LE , 51 % d’EBRA qui détient Delaroche. Le Crédit mutuel est actionnaire à 49% de la LE (via Le Républicain lorrain), à 49% d’EBRA, donc de Delaroche. Le chiffre d’affaires consolidé du groupe pour 2006 se monte à 445 M€. En année pleine, cela équivaut à 550 M€. Le résultat net consolidé se solde par un déficit de 15 M€. Le DL et le pôle Bourgogne (JSL et BP) sont à l’équilibre. Le Progrès en déficit (- 4 M€ et en manque d’autofinancement de 25,6 M€). Les comptes de L’ER ont plongé, ceux des DNA ne se sont pas redressés. La dette du groupe (340 M€ fin 2006) est portée par le Crédit mutuel (194 M€) et par Delaroche. La dette est estimée à 380 M€ à ce jour. Les frais financiers (9,2 M€) sont supérieurs au résultat économique brut (8,1 M€) en 2006. L’échéance de la dette à rembourser pour 2008 est de 15,7 M€. Or, un résultat économique brut de 5 % dégagerait 13 M€ pour rembourser et investir... La dette a donc été déplacée de SPI (holding DNA) au Crédit mutuel. Le coût des 600 à 700 départs en 2008 est estimé à 75 M€ et générerait une économie de 40 M€ par an. D’où un horizon théorique de redressement en 2009, fixé par la direction qui entend s’en sortir par une exploitation à nouveau positive. Un point de diffusion en moins, c’est 35 emplois qui disparaissent...

Les projets de la direction Réagissant à l’exposé de l’expert, Gérard Colin a ironisé : « avec le peu d’information dont il dispose, il ne peut pas faire mieux qu’échaffauder des hypothèses. Seulement cinq personnes sont au courant (les administrateurs d’Ebra), les informations seront données quand les décisions se présenteront. » Quels sont les projets de la direction ? Gérard Colin : « ils seront connus dans chaque entreprise ». Quid des synergies ? Quid des projets de chaque entreprise mais concernant l’ensemble du groupe ? Gérard Colin : « Ils concernent l’ensemble des secteurs d’activité : les achats (par exemple une centrale pour acheter 110.000 tonnes de papier) ; le juridique (tout est regroupé, on supprime les prestataires extérieurs) ; la trésorerie (on répartit les fonds en fonction des besoins) ; les agences utilisées par les différentes rédactions (exemple la météo : on peut économiser 40%) ; la fabrication (on travaillera tous avec les mêmes systèmes Protec et Milénium dans deux à trois ans, Hermès sera abandonné à la LE en 2008, Milénium sera présenté après les vacances à L’ER et appliqué en 2009) ; une politique unique en matière d’hebdomadaires d’informations (six titres du groupe Progrès confiés en gérance reviendront dans le groupe, idem à Grenoble, en Haute-Saône, à Besançon) ;
-  l’impression : un projet sera rendu fin 2008 ; les ventes ; la politique des suppléments ; les ressources humaines ;
-  le multimédia est lié aux capacités informatiques, on a créé une filiale informatique où l’on détient 51% et Euroinformation qui a 2000 salariés 49%... la télé sur le web est exéprimentée au DL, sur le téléphone portable, notre partenaire a racheté NRJ-portable ( ? ? ?), on va choisir entre deux sites de PA...
-  pour le contenu rédactionnel, qui passe par le droit d’auteur, des discussions sont engagées par un rédacteur en chef que j’ai choisi (Pierre-marie Seghers, DL) et Serge ferreira (DRH). Il faudra respecter le droit d’auteur mais l’aménager en fonction de nos projets...
-  les conditions sont aujourd’hui réunies pour qu’EBRA comprenne L’Alsace et le Républicain Lorrain sans changer la répartition 51-49 du capital. Le dossier de L’Alsace sera présenté en janvier à la DGCCRF... »

Les questions des représentants du personnel ont permis de compléter ce tableau qui reste opaque :

-  Le dossier pour le Républicain lorrain sera présenté plus tard.
-  les synergies entre L’Alsace et les DNA sont « espérées pour le 2e semestre 2008 ». Gérard Colin ne « sait pas » leur coût en nombre d’emplois.
-  « les résultats 2007 et 2008 ne sont pas déphasés par rapport aux moyens »
-  « les trois entreprises qui n’ont pas présenté de PMS à 50 ans vont probablement demander des avenants pour des départs à 51, 52 ou 53 ans, j’y tiens »
-  une soixantaine de journalistes se sont manifestés pour partir en clause de cession au Progrès, au DL, au JSL et au BP.
-  « c’est un difficulté d’arriver à constituer une équipe de dirigeants ayant envie de travailler avec nous ».
-  Interrogé par le SNJ sur les difficultés de fonctionnement quotidien des rédactions, Gérard Colin répond : « comme tous les journalistes, vous fabriquez un scénario à partir de bribes d’informations... » Préfère-t-il les journalistes qui se taisent ou ceux qui se mettent au garde-à-vous ?
-  « les DNA vont entrer dans EBRA ». Est-ce la réponse à l’entrée annoncée de L’Alsace dans EBRA ? « Sûrement pas ! C’est par facilité que les DNA entreront dans le fonctionnement d’EBRA, mais pas sur le plan juridique ». Une facilité qui entretient évidemment la confusion...
-  « Il faut réduire le temps de mise en page au bénéfice de la recherche de l’information ». Le SNJ rétorque sur la lourdeur de Milénium testé au Progrès, le vice PDG répond : « l’essai est beaucoup trop long ». Il ne comprend toujours pas à quoi sert un journaliste secrétaire de rédaction...
-  Pourquoi le non renouvellement fin 2007 des CDD à L’ER des Vosges ? Prépare-t-on sa fermeture ? « Posez la question au CE, il n’y a pas de projet pour 2008 dans les Vosges ».
-  Droit d’auteur : « il faut reconnaître l’intérêt du périmètre EBRA, notre objectif est une organisation permettant à un journaliste d’un titre de publier dans plusieurs titres, par exemple lors des JO ». Pour tous les syndicats de journalistes, il suffit de respecter la loi en payant des piges. Gérard Colin n’en a pas l’intention : « Ce n’est pas ce qui est convenu avec ceux qui veulent partir et j’ai des candidats... » Avis aux confrères : accepter de travailler gratuitement pour un autre titre peut gravement nuire à l’emploi des journalistes, mais aussi aller à l’encontre de l’intérêt des lecteurs qui n’auront pas le coup de projecteur qu’ils sont en droit d’attendre sur leurs althètes régionaux.

Un bureau intersyndical Le nouveau comité de groupe émane des CE de onze entreprises. Il compte 51 membres dont 22 titulaires ayant le droit de vote, autant de suppléants (votant en l’absence des titulaires), et 7 représentants syndicaux (sans droit de vote). Le comité se réunit au moins deux fois par an. Son rôle principal est l’information des salariés.

Répartition des sièges : 10 Filpac-CGT, 5 CFDT, 4 SNJ, 1 FO, 1 CFE-CGC, 1 CFTC Collège journalistes : 6 sièges dont 4 SNJ, 1 FO, 1 CFDT Collège cadres : 4 sièges dont 2 CFDT, 1 CFE-CGC, 1 Filpac-CGT Collège ouvriers employés : 12 dont 9 Filpac-CGT, 2 CFDT, 1 CFTC

La majorité du comité de groupe a accepté la proposition du SNJ de répartir les quatre postes du bureau sur quatre syndicats, d’y assurer la représentation des trois collèges, des différentes zones géographiques et la parité, afin de garantir la transparence dans la gestion du budget de 100.000 euros. Cependant, le consensus n’a pas été trouvé en réunion préparatoire, un vote a été nécessaire en cession plénière, la Filpac-CGT présentant un candidat pour chaque poste. Voici les résultats : Secrétaire : Pascal Fiatte (Filpac-CGT-ER) : 21 voix sur 21 votants (un titulaire et son suppléant CFDT étaient excusés). Secrétaire adjointe : Marie-Sophie Kormann (SNJ-DNA) élue avec 11 voix ; (Filpac-CGT 10 voix) Trésorière : Hélène Ducrès (CFDT-DL-Publiprint) élue avec 11 voix ; (Filpac-CGT 10 voix) Trésorier-adjoint : Eric Puget (CFE-CGC-Le Progrès) élu avec 11 voix ; (Filpac-CGT 10 voix).

 
Publié le vendredi 28 décembre 2007

 

Publié dans presse4243

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